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Oyakodon Baka
24 janvier 2007

fantôme de moi, fantôme de toi

Ce site, si je ne l'avais pas croisé ce fameux 1er août 2001 à 17h03, ma vie n'aurait radicalement pas été la même. J'aurais peut-être fait autre chose, de mieux pourquoi pas, mais j'aurais sans nul doute loupé ça. Loupé une grande période de ma vie.

De simple consommateur qui livre ses expériences de façon maladroite, je suis rapidement devenu membre à part entière de ce qu'on appelle une communauté virtuelle.

J'y ai été intégré. Pas autant que d'autres membres qu'on aurait pu qualifier de gourous ou encore de grandes prêtresses, avec ironie mais finalement pas tant que ça, mais en tout cas suffisamment intégré pour avoir appartenu à plusieurs groupes, définis par mes rencontres successives avec les membres, groupes que je représente par des villes, lieux symboles en quelque sorte, points de ralliement de ces (re)trouvailles IRL, où je me suis rendu au moins une fois.

Rencontres virtuelles sur le site, et pour bon nombre d'entre elles donc, réelles dans un second temps. Des rencontres officielles étaient organisées mais je les fuyais. Je préférais les rencontres en plus petit comité, entre membres "choisis", pas de rencontres de masse où personne ne parle à personne finalement.
J'y ai rencontré des gens qui sont aujourd'hui des amis.
J'y ai rencontré des gens avec qui j'ai cru que je pourrais construire quelque chose.
J'y ai rencontré des gens que j'ai perdu de vue aujourd'hui.

Ces rencontres, ces complicités ont été, et je ne sais toujours pas dire pourquoi aujourd'hui, très importantes pour moi. Mais peut-être...
Parce que ce site était une micro société. Est toujours une micro société.
Et parce qu'en tant que membre de cette micro société, je me devais de prouver mon intégrité. Théorie intéressante. Prouver mon intégrité, définir ma personnalité, mon rôle, ce pour quoi les autres membres recherchent ma compagnie. Comme pour n'importe quelle société où chacun doit se définir. Et ça passait toujours par l'appartenance, reconnue ou pas qu'importe elle était là, à un "clan". Sans obligation aucune, tout est question d'affinité.

C'était ma drogue. Tous les jours, commenter des avis, ceux du "groupe" ou d'autres membres, laisser des messages dans les BAL, BAL maintes fois lues chez l'un et chez l'autre pour rechercher qui est là, qui a dit quoi aujourd'hui, chercher le truc marrant du jour, souvent le truc qui fera rire les autres, et corollaire de tout ça, conversations sur MSN ou AIM, à deux ou à plus. Pour parler de ce qui se passait sur le site, ou pour parler d'autre chose. Les membres du site que même nous ne connaissions pas, faisaient partie de notre vie sur le site, nous leurs inventions des histoires, des travers, des rumeurs naissaient souvent et des délires sans fin, parfois même immortalisés par de nouveaux avis, avec ensuite les commentaires qui allaient bien.

Même si j'ai toujours gardé contact avec les membres de mes groupes, j'ai eu plusieurs périodes. En presque 6 ans, dont 4 de réelle activité, je pense que ce site m'a vu mûrir, a été le lieu d'expression de mes craintes, mes interrogations, mes joies, mes espoirs.

Ma première période : Marseille. Elle a été purement amicale, et euphorique. Des mails interminables, une générosité débordante que je n'ai retrouvé et ne retrouverai chez personne d'autre, une ville du sud que je ne connaissais pas mais qui pour moi est ta ville, Nico. La ville où on s'amuse, où tout semble évident et facile, où la porte est toujours ouverte. J'y suis allé plusieurs fois te voir. Je veux y revenir un jour.

La deuxième, déjà plus ambiguë : Lille. Les rencontres se font plus nombreuses, les échanges sont plus individuels, personnalisés. C'est un groupe, tout de même. Qui pour moi est né de deux personnes ou plutôt d'une. Que je pense avoir sincèrement aimé, toute virtuelle qu'elle était. Je pense qu'il est possible d'aimer une personne virtuelle, c'est juste que les sentiments sont d'une autre sorte. Ces sentiments, beaucoup plus intellectualisés et fantasmés, doivent être le prélude de sentiments réels, lors d'une rencontre "IRL" qui doit se faire, comme une suite logique. Rencontre qui ne s'est pas faite. Tu resteras le mystère de ma vie virtuelle sur ce site. Je t'ai oublié, cependant tu refais surface au moment où je ne m'y attends pas toujours, comme un fantôme, un regret, de ne pas avoir donné à ma vie une direction professionnelle que pourtant tout ou presque, me destinait à prendre. Qui aurait fait que peut-être, on aurait pu s'entendre. Enfin je me plais à le croire. Je voudrais te croiser, par hasard. Te reconnaître. Te sourire.
Mais ce groupe m'a vite dépassé, de par son envergure toujours grandissante, et ses codes dans lesquels j'ai fini par avoir peine à me reconnaître. Malgré tout j'aimais ce groupe, j'aimais à savoir que j'en faisais partie. Mais il a fini par se dissoudre, se perdre. Victime de je ne sais quoi. La lassitude. Des quiproquos.

J'avais rejoint en parallèle, un 3ème groupe : Paris. C'est parti d'un délire comme souvent. Délire devenu peu à peu trop poussé, à tel point que faire différence entre délire et désir devint incertain. Il fallut bien freiner l'élan qui aurait pu nuire à tous les deux. Malgré tes propos légers, tu fus le plus sage. Tellement sage que grâce à toi, on se parle encore aujourd'hui. Mais là par contre, le groupe fut en grande partie virtuel. Orchestré par des échanges intenses par BAL interposée ou AIM.


Puis chacun partit de son côté, c'est ce qui se passe toujours. Aucun groupe ne succéda pour moi, seulement la continuité des échanges avec les rares membres ayant traversé les époques ou quelques échanges anecdotiques avec les membres rescapés d'anciens groupes.

Ce site fut pour moi et pour beaucoup, un lieu d'intense échange, de partage, une "tribune d'expression". Mais toute drogue a ses inconvénients. De délires et échanges, naquirent çà et là des tensions, des jalousies, des frustrations. Il a bien fallu partir un jour, départ progressif, silencieux, précipité par la rupture l'une après l'autre, des derniers contacts que j'y entretenais.
Comme si tout avait été programmé.

Maintenant quand j'y reviens, je ne vois qu'une grande table vide. Des ruines, des fantômes, des restes, de rares membres qui sont restés, qui ont continué mais qui ne m'étaient pas spécialement chers à l'époque de mon activité. D'autres qui m'étaient chers mais dont la fiche reste désespérément vide de toute trace de passage récent, comme s'ils étaient partis du jour au lendemain sans jamais décider de revenir.
Je vois aussi de nouveaux membres que je ne connais pas. Une nouvelle ambiance, de nouveaux groupes qui me sont étrangers.
Je vois des souvenirs, plein de souvenirs, plein de moments, d'instants, des pseudos, des messages qui me rappellent chaque époque et surtout, une intense nostalgie. Elle en est presque palpable.

L'impression que tout cela n'était qu'un rêve, à quel point ça me semble irréel.
A quel point rien ou si peu, ne reste de tout cela.
A quel point je ne me reconnais pas toujours dans mes écrits, dans mes messages d'avant.
A quel point je me jalouse presque d'avoir été ce que j'ai été sur ce site.
A quel point certaines choses sont anciennes, paraissent furtives, sont finies, révolues...
Qu'elles en sont douloureuses.
Que je me sens coupable d'y penser à nouveau.

Et je vois surtout que j'ai quitté cette école, que comme toute école, y revenir serait inutile, vain, stupide, une régression en quelque sorte. J'y ai fait mon temps, j'y suis passé, j'y ai apposé ma griffe, laissé ma trace, remué mon petit bout de terre. Mais je n'y ai plus ma place.

Au revoir.

Ciao.

Je t'ai tellement aimé. Tu me manques.
Mais merci.

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