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Oyakodon Baka
19 mai 2013

Mozart

La répétition générale s'est plutôt mal passée.
On s'est planté plusieurs fois, Flora ma voisine de pupitre, visiblement très stressée, a été d'une humeur massacrante durant les vingt dernières minutes.
Une fois la répétition terminée Cyrille le violoncelliste solo, un de mes plus anciens camarades, me demande comment j'ai fait pour garder mon calme. Mais j'ai l'habitude de Flora, depuis le temps qu'on fait des concerts ensemble. Elle a déjà été pire que ça.

C'est le jour du concert.
Je me gare au parking souterrain, juste à côté de l'entrée d'une galerie ouverte uniquement les jours de concert, et par où on accède au bâtiment.
Le hall est désert. Je suis un peu en avance.

La salle de concert est vide, les chaises et les pupitres sont en place. On ne joue pas dans la Grande salle cette année, mais ça reste pour moi un concert spécial. Un lieu de prestige.
Je monte sur scène, je prends une photo des sièges en cuir noir encore vides de l'audience. J'hésite à la poster sur facebook, je me ravise.
J'entre dans les coulisses. Flora est déjà dans la loge en train de jouer frénétiquement sa partition. Son stress est presque palpable. Elle enchaîne par un morceau de musique celtique qui n'a rien à voir avec Mozart, mais qu'elle s'entête là aussi, à en jouer et rejouer les passages jusqu'à ce qu'elle y arrive, à grands renforts de grognements d'exaspération. Elle gaspille un peu son énergie, là.

Je déballe mon violon, je m'accorde. Les miroirs de la loge sont éclairés par des rangées d'ampoules du plus bel effet, mais qui chauffent : les changements de température risquent de désaccorder les instruments. J'éteins les rampes. Flora les rallumera plus tard pour se maquiller.
Laurence travaille aussi sa partition. Elle si calme d'habitude, est également anxieuse. La générale désastreuse d'hier y est certainement pour quelque chose. Elle m'avoue avoir pris des anxiolytiques.

David est dans la loge voisine. C'est le chef d'orchestre. Cyrille est avec lui, et comme à chaque concert, il explique qu'il a un trac de fou et qu'il n'aime pas jouer en public, mais qu'il se force car il n'a pas le choix. Vu ses performances, ce trac lui est certainement bénéfique.

Le régisseur annonce qu'il va ouvrir les portes au public dans trois minutes. Notre entrée en scène est dans quinze minutes.
J'ai invité plusieurs personnes au concert, mais les billets n'étant pas numérotés j'ignore où elles seront placées. J'espère du bon côté : celui où elles pourront me voir "en face".

Les chanteuses arrivent. Elles cherchent une loge libre pour se préparer, chauffer leur voix. Je leur désigne l'angle du couloir qui mène vers une loge commune où se trouvent déjà les choristes.

Je donne le La à mes camarades qui s'accordent. Nous sommes stressés. David nous rassure : nous commençons le concert par une œuvre avec laquelle nous sommes à l'aise. Ensuite, l'attention du public devrait être davantage portée sur les chanteurs.

C'est l'heure. Le régisseur ouvre la double porte. Mes camarades entrent en scène, les applaudissement retentissent. La salle est comble. Je les vois sur le moniteur. Ils prennent place, les applaudissements cessent. Au bout de quelques longues secondes je demande à mi-voix à David si je peux y aller, il me répond avec bienveillance par l'affirmative. Un rituel. Je sais bien que je peux y aller.
J'entre dans la salle, les applaudissent reprennent. Je salue le public.
Nous nous accordons. Je m'assois. Un silence de quelques secondes... David entre en scène, nous nous levons, applaudissements.
David me serre solennellement la main. Nous nous asseyons. Fin des applaudissements, pour de bon.

Les premières mesures du Divertimento sont décisives.
Tout ira bien.

16-05-2013p






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